"Un vingtième Marathon pas comme les autres."
Vannes 2023.
"Qui veut voyager loin ménage son glycogène"
(François Peronnet)
J- 15 semaines :
Pour mon 20ème Marathon et pour fêter mes 70 ans hors taxes, jouer à domicile me semble une bonne idée. Aucun objectif de temps prévu. Mais ! Mais ! Dès que l’on s’accroche un dossard sur la poitrine, les bonnes résolutions de "l’avant" s’évanouissent "pendant", en explosant le temps, au kilomètre, minutieusement préparé, dès les premières foulées ; la stratégie parfaite avec tous les éléments réunis pour faire connaissance avec le métier de maçon dans la dernière partie de la course.
Pour me donner un objectif raisonnable, puisque quoi que l’on fasse quoique que l’on dise, les années passent, les performances trépassent ; je décide pour me faire plaisir de partir le dernier et de remonter petit à petit la file des futurs maçons. Première étape connaître mon potentiel du moment. Un test pour déterminer ma Vma est indispensable et il me donne un potentiel de 4h. Le 4h15/4h30 est donc réalisable. L’utilisation de la calculatrice pour calculer les allures des différentes séances est nécessaire pour les respecter.
J- 12 semaines :
Le plaisir de suivre à la lettre et au chiffre près la préparation est comme neuf. Quatre séances par semaine pendant 12 semaines : une séance de Vma, une séance au seuil et deux séances d’endurance, les plus difficiles à réaliser, car l’allure est rarement respectée à cause d’un égo volumineux. Sans omettre de se mettre en condition d’hydratation et d’alimentation du jour de l’épreuve au moins pendant la séance longue d’endurance de la semaine.
J- 5 semaines :
Le projet initial de courir le Marathon de Vannes en ramassant les fous furieux du départ (je plaisante ….. un peu), se modifie en accompagnateur d’Élise, son premier Marathon. Son souhait est de parcourir la distance en 4h30’, temps qui correspond il est vrai à son potentiel. Nous arrivons à plusieurs à lui passer le message : "Un premier Marathon se termine dans le plaisir, sans souffrance, pour que ce premier Marathon garde une saveur particulière dans le tiroir aux souvenirs. Apprendre à appréhender les prochains pour donner au chronomètre, à ce moment là une place plus importante."
L’activité professionnelle d’Élise ne lui permet de réaliser que trois entraînements par semaine ce qui rend quasi impossible l’atteinte de son objectif. Message à faire passer : "Le 4h45’ est plus sérieux à envisager." Tout en gardant dans un coin de notre tête, que le 5h sera l’objectif.
J-0 :
Neuf heures au pied des remparts de la ville de Vannes. Dans l’attente du départ avec Gwen le compagnon d’Élise et son père qui déborde d’inquiétudes et d’émotions. Nous prenons bien soin de nous positionner en fin de peloton pour éviter d’être entraînés dans l’euphorie des premières foulées. Combien ont prévu, par exemple, un 6’ au kilomètre de moyenne et qui se rende compte qu’il on couru le premier en 5’30.
Le Marathon de Vannes, nouvelle formule, reste magnifique et compliqué. Élise se cale le plus possible dans mes talons pour éviter le maximum de résistance à l’air. L’allure jusqu’au dixième kilomètre se déroule sur un rythme de dix secondes de plus au kilomètre ; au moins pour une raison physiologique : permettre l’utilisation des deux carburants nécessaires à la réussite dès le début de l’épreuve : le glycogène et la matière grasse. Ce qui rendra les derniers kilomètres plus aisés en évitant l’artisan maçon prêt à vous apprendre les rudiments de son métier dans le dernier quart de l’épreuve, qui à cet instant portera bien son nom : "L'EPREUVE".
La vraie première difficulté du parcours se situe autour du quinzième kilomètre : la sortie du tunnel du pont de Kérino. Nous décidons de marcher pour franchir cette difficulté, même si nous aurions pu continuer à courir. L’expérience avec la petite dose d’humilité ajouter au long de mes vingt Marathons dans le thé du matin du jour de la course résonne au rythme du mot prudence.
Le premier tour se termine. Les parents d’Élise sont présents à différents endroits du parcours, l’inquiétude dans les yeux. Gwen, son compagnon le sourire aux lèvres, fier. Les kilomètres défilent en omettant aucun ravitaillement. S’hydrater, se laver les bras, le visage les jambes pour faciliter la transpiration et son évaporation évitera le coup de chaleur. Les pores de la peau ont tendance à se boucher à cause des poussières. Il suffit de regarder l’état des chaussettes à l’arrivée.
Aux ravitaillements, se limiter à son alimentation habituelle, testée lors des sorties longues, pour éviter les problèmes gastriques qui touchent 40 % des Marathoniens. Imaginer la réaction de l’estomac quand on lui présente quartiers d’orange, pain d’épices, carré de chocolat, banane, etc ….. Sa réaction est au minimum des ballonnements, des nausées, voir plus.
Le deuxième tour est l’alliance (voulue) de marche et de course en fonction du dénivelé. Pour connaître les sensations, les impressions d’Elise, je lui demande une note régulièrement. La note ne descendra jamais en-dessous de 7/10.
Au 30ème un petit coup de mou, jusqu’à entendre : "Je ne pensais pas, qu’un Marathon c’était aussi dur ….. ". A ce moment là, la note a dû descendre en dessous de 5. La présence de Marjorie et de Gwen redonne du pep à Elise.
Marche, course, hydratation et cette petite phrase que je prononce de nombreuses fois : "Allez ! On y va !" Les kilomètres défiles, on ne verra pas les frelons qui ont piqué une quarantaine de coureurs et qui on obligé l’organisation a détourner le parcours de quelques hectomètres pour leur sécurité.
40, 41ème kilomètre, Elise me regarde et me dit : "Allez ! On y va !". Reprendre à son compte cette phrase que j’ai souvent prononcée m’a fait comprendre que la mission est accomplie. Dernier kilomètre à 10km/h …..
Émotionsssss à l’arrivée, soulagement des parents, Gwen prêt à prendre soin d’Élise dans les jours à venir. Message et photo à notre "maître" à tous qui a suivi ce premier Marathon de près tout en n'étant pas présent.